Page Title

Publications

Dans un souci de transparence et d’information, le BFP publie régulièrement les méthodes et résultats de ses travaux. Les publications sont organisées en séries, entre autres, les perspectives, les working papers et planning papers. Certains rapports peuvent également être consultés ici, de même que les bulletins du Short Term Update publiés jusqu’en 2015. Une recherche par thématique, type de publication, auteur et année vous est proposée.

Quel potentiel de réduction de la congestion routière peut offrir le covoiturage ? [ Article 006 - 28/01/2021]

!

La version de l'article disponible ci-dessus en format HTML ne contient généralement pas l'ensemble des informations reprises dans l'article en format pdf. Pour une version complète de l'article (avec les graphiques et tableaux), veuillez télécharger l'article en format pdf disponible dans le cadre "PDF & downloads" situé à droite.

Combiner des mesures maniant le « bâton » (un prélèvement kilométrique généralisé) et la « carotte » (soutien du covoiturage) permettrait de relever le taux d’occupation des voitures de 1,44 à 1,5 en Belgique. Cette augmentation relativement limitée s’explique principalement par la proportion relativement faible de trajets pour lesquels une augmentation du coefficient d’occupation est une option réaliste, et par certains des inconvénients liés à l'organisation du covoiturage. Toutefois, cette combinaison de mesures peut conduire à une amélioration sensible des conditions de circulation aux endroits et aux périodes où la congestion est la plus forte.

Quelles mesures pour encourager le covoiturage ?

Pour lutter contre l’augmentation de la congestion et des émissions polluantes, les responsables politiques entendent réduire les déplacements en voiture dans leur ensemble. Un moyen qui peut contribuer à la réalisation de cet objectif est de relever le taux d’occupation moyen des voitures, soit le rapport entre la demande de transport (en passagerskilomètres) et les véhicules-kilomètres parcourus. En Belgique, la Région de Bruxelles-Capitale ambitionne d’augmenter le taux d’occupation des voitures de 1,3 à 1,35 par la promotion du covoiturage, tandis que la Région wallonne vise une augmentation de ce taux d’occupation de 1,3 à 1,8.

La plupart des mesures proposées dans le Plan national intégré Energie-Climat belge partagent l’objectif commun de vouloir encourager le covoiturage (politique de la carotte), plutôt que de décourager la conduite en solitaire (politique du bâton).

Les mesures d’encouragement incluent généralement les bandes d'autoroute réservées aux voitures à plusieurs occupants ou la construction de parkings de covoiturage à proximité des autoroutes. Néanmoins, il est également possible de subventionner les navetteurs qui se déplacent ensemble ou de soutenir des applications de covoiturage.

Une mesure typique maniant le bâton est le prélèvement kilométrique : même si ce prélèvement en tant que tel ne vise pas à promouvoir le covoiturage, le covoiturage répartit son coût entre un nombre plus élevé de passagers. Le covoiturage peut également être encouragé par des mesures ciblées, comme l’instauration de bandes réservées aux véhicules à occupation multiple (« HOT - High Occupancy Toll » en anglais), soit des bandes accessibles gratuitement aux véhicules accueillant plus d'un passager (ou à d’autres véhicules exemptés), tous les autres véhicules en revanche s’acquittent d’un prélèvement pour emprunter la voie.

Que nous dit une analyse pour la Belgique ?

Quel est l’impact de telles mesures en Belgique ?

Une analyse menée avec le modèle de demande de transport pour la Belgique, PLANET, montre qu’un taux d’occupation de 1,5 peut être atteint par une combinaison de mesures alliant le bâton et la carotte. Cette combinaison inclut un prélèvement kilométrique de 4 centimes d’euro et des mesures de soutien au covoiturage qui réduisent de près de 50 % le coût variable du covoiturage pour les déplacements domicile-lieu de travail. Selon nos estimations, une telle combinaison de mesures générerait environ 2 milliards d’euros de recettes publiques annuelles supplémentaires.

Les mesures purement d’encouragement qui conduisent à des résultats similaires en termes de taux d’occupation auraient un impact budgétaire net d’environ 1 milliard d'euros sur base annuelle.

Même s’il constitue une avancée par rapport à la situation actuelle (le taux d’occupation moyen est de 1,44 à l’échelle nationale), un taux d’occupation de 1,5 ne répond pas aux objectifs des politiques régionales belges dans leur ensemble. Cela signifie que d’autres (types de) mesures doivent être mises en oeuvre pour atteindre ces objectifs.

Qu’est-ce qui explique ces résultats ?

Plusieurs facteurs interdépendants, qui pourraient expliquer le potentiel limité d'augmentation du taux d'occupation des voitures, sont identifiés.

Un premier facteur est donné dans le tableau 1 qui ventile les déplacements annuels prévus en Belgique en 2025 (exprimés en passagers-kilomètres) par motif de déplacement et mode de transport utilisé. À votre étonnement peut-être, la plupart des déplacements ne sont pas effectués pour des motifs professionnels (déplacements domicile-lieu de travail, voyages d'affaires). En Belgique, environ 60 % des déplacements sont réalisés pour d’autres motifs (par exemple, les courses, les loisirs, les visites familiales, les promenades).

Clairement, le potentiel de progression du covoiturage pour ces motifs est plus limité : le taux d'occupation pour les déplacements familiaux, par exemple, est intrinsèque à ces déplacements.

Il ressort également du tableau tableau 1 que le covoiturage représente moins de 10 % des passagers-kilomètres parcourus pour le motif « travail ». Toutefois, ce n’est pas dû à un désavantage du covoiturage en termes de coût, par rapport à d’autres modes, loin de là.

Pour mieux comprendre, référons-nous au concept du « coût généralisé du transport » : il représente la somme du coût monétaire du déplacement et du coût d’opportunité du temps passé dans le déplacement. Letableau 2 résume le coût généralisé et le coût monétaire de tous les modes de transport de passagers dans le cadre du motif « travail » (il s’agit d’une projection de coûts pour l’année 2025).

Seul le train a un coût généralisé plus faible que le covoiturage. En d’autres termes, si le coût généralisé importait aux voyageurs, on pourrait s’attendre à ce que le covoiturage occupe une part modale très élevée. 

Ces chiffres, couplés aux statistiques sur les parts modales, impliquent que, dans la perception des utilisateurs, le covoiturage présente certains inconvénients intrinsèques qui ne sont pas captés par le coût généralisé.

Ces désavantages ne sont pas trop difficiles à imaginer : la nécessité de coordonner les horaires de travail et de loisirs avec les autres passagers, le détour à faire par un parking de covoiturage, le risque de vandalisme et de vol lorsqu'une voiture est laissée sur un parking de covoiturage, le risque de retard dans le chef des autres passagers, etc. Cela explique pourquoi le potentiel des mesures purement d’encouragement pour promouvoir le covoiturage est plutôt limité, à moins que des ressources importantes soient déployées pour contrebalancer ces inconvénients.

Les moyennes peuvent cacher beaucoup de choses...

Même si les effets globaux des mesures analysées qui visent à encourager le covoiturage sont limités, gardons à l’esprit que la congestion est souvent concentrée dans le temps et dans l’espace. Dans des zones fortement congestionnées, même une faible progression du covoiturage peut avoir des effets non négligeables au niveau local.

À titre d’exemple, dans la zone métropolitaine entourant Bruxelles, la combinaison des mesures alliant la carotte et le bâton entraîne une diminution de 13 % des déplacements en voiture aux heures de pointe et une progression de 27 % de la vitesse moyenne (par rapport à une valeur actuelle d'environ 60 km/heure). Dans la zone qui entoure Anvers, les déplacements en voiture diminuent de 20 % aux heures de pointe et la vitesse augmente de 18 % (par rapport à une vitesse initiale de 60 km/heure).

À titre de comparaison, les résultats pour la Belgique sont les suivants : une diminution des déplacements en voiture aux heures de pointe d'environ 16 % et une augmentation de la vitesse moyenne de 7 % (par rapport à une valeur actuelle d'environ 68 km/heure). En dehors des heures de pointe, la vitesse moyenne se situe autour de 80 km/heure, les déplacements en voiture diminueraient d'environ 14 % et la vitesse augmenterait d'environ 2,5 %.

En résumé ...

Le covoiturage pour les déplacements domicile-lieu de travail peut être encouragé par des politiques maniant la carotte mais le coût de ces politiques est très élevé. Une mesure maniant le bâton comme un prélèvement kilométrique a pour principal avantage qu’il encourage également des transferts plus généraux de la voiture vers les transports en commun et les modes actifs : le covoiturage est seulement une des alternatives à l’utilisation de la voiture en solitaire. Allier les mesures maniant la carotte et le bâton permet de combiner l’effet incitatif fort d’un prélèvement kilométrique et les dispositions qui renforcent l’attrait du covoiturage et donc adoucissent la pilule. En outre, une telle combinaison de mesures génère des recettes publiques nettes.

Même si les mesures analysées ne répondent pas aux objectifs des politiques actuelles, les effets locaux sur la congestion sont loin d’être négligeables. 

Il convient de souligner que la présente analyse n’entend pas proposer un programme d’action spécifique mais vise plutôt à exposer les effets des différentes mesures en faveur du covoiturage. Les valeurs des paramètres choisis pour réaliser l’étude sont illustratives.

  Documents associés

None

  Thématiques

  JEL

None

  Mots clés

None

Please do not visit, its a trap for bots