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Télétravail et demande de transport : une évaluation dans le modèle PLANET [ Working Paper 06-20 - ]

L’objectif de cette étude est de prendre un certain recul sur le sujet du télétravail comme outil de gestion des problématiques de mobilité. Au-delà du regain d’intérêt dans le débat public dont le télétravail bénéficie, et de sa forte mise en avant depuis le début de l’épidémie de COVID-19, il s’agit ici d’objectiver au moyen de sources fiables et de modèles éprouvés les relations entre augmentation du télétravail et diminution de la demande de transport. A cet effet, le modèle PLANET du Bureau Fédéral du Plan a été adapté pour pouvoir explicitement tenir compte d’évolutions de cette pratique dans ses projections à long terme.

  Auteurs

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A : Auteur, C : Contributeur

  Type de publication

Working Papers

Le Working Paper présente une étude ou analyse menée d’initiative par le BFP.

Les déplacements entre domicile et lieu de travail, ou déplacements pendulaires, sont un élément majeur de pression sur les infrastructures de transport en Belgique. Ils représentent ainsi près de la moitié des distances parcourues en heures de pointe, et sont un important facteur de congestion, en particulier dans les grandes agglomérations. Une piste d’amélioration fréquemment évoquée est l’augmentation du taux de pratique du télétravail, qui permettrait de modérer cette demande de pointe. Son intérêt dans le cadre d’une politique de mobilité autour de l’activité professionnelle semble ainsi évident.

L’objectif de cette étude est de prendre un certain recul sur le sujet du télétravail comme outil de gestion des problématiques de mobilité. Au-delà du regain d’intérêt dans le débat public dont le télétravail bénéficie, et de sa forte mise en avant depuis le début de l’épidémie de COVID-19, il s’agit ici d’objectiver au moyen de sources fiables et de modèles éprouvés les relations entre augmentation du télétravail et diminution de la demande de transport. A cet effet, le modèle PLANET du Bureau Fédéral du Plan a été adapté pour pouvoir explicitement tenir compte d’évolutions de cette pratique dans ses projections à long terme.

Nous commençons par fixer une définition opérationnelle du télétravail, adaptée à nos objectifs liés à la mobilité, en tenant compte du contexte législatif et des contraintes de modélisation associées aux modèles disponibles et aux types de scénarios que nous souhaitons analyser. Dans la présente étude, on entend par télétravail le fait d’effectuer depuis son domicile, en accord avec son employeur et de manière régulière, des tâches professionnelles habituellement effectuées sur son lieu de travail, sans se rendre les journées en question sur son lieu de travail habituel (en évitant donc un trajet). Cette dernière précision est importante car elle permet d’assurer l’absence de déplacement domicile-travail le jour télétravaillé et donc de faire un lien clair et univoque entre télétravail et demande de transport.

Nous décrivons ensuite le contexte du marché belge du travail autour de cette définition au travers des sources disponibles. L’étude se focalise principalement sur l’enquête Télétravail (SPF Mobilité et Transports, 2018) qui permet de considérer conjointement une mesure de la pratique du télétravail et des caractéristiques sociodémographiques, économiques, et géographiques des répondants, exploitable dans le modèle PLANET. La définition du télétravail reprise dans l’enquête cadre avec la définition opérationnelle énoncée ci-dessus et les liens entre télétravail et déplacements pendulaires peuvent être utilisés dans des scénarios d’augmentation de la pratique du télétravail à long terme, objectif premier de notre analyse. L’enquête exploitée permet également d’évaluer sommairement le nombre de déplacements pour d’autres motifs (loisirs, shopping, services...) induits un jour de télétravail, déplacements que la personne n’aurait pas réalisés si elle n’avait pas télétravaillé ce jour-là.

Les différentes étapes qui jalonnent la construction de scénarios d’augmentation du télétravail dans PLANET sont ensuite abordées. La première étape consiste à évaluer le potentiel de développement réaliste de la pratique du télétravail sous l’hypothèse d’organisation productive constante, de sorte à pouvoir calibrer des scénarios d’augmentation du télétravail. Le lien entre propension à télétravailler et caractéristiques des travailleurs (âge, sexe, niveau d’éducation) et de leur emploi (branche d’activité, distance au lieu de domicile) est ensuite étudié, dans le contexte du modèle PLANET et des variables qui y sont disponibles en projection. Cette deuxième étape permet d’adapter les taux de déplacements des individus et, par là même, le nombre de trajets projeté pour le motif domicile-travail dans PLANET. Une dernière étape traite des adaptations méthodologiques mises en oeuvre pour tenir compte de la pratique du télétravail et de son augmentation de manière endogène dans le modèle.

Ceci permet la définition d’un scénario d’augmentation volontariste du télétravail en Belgique, postulant un développement significatif de cette pratique pour atteindre son plein potentiel, tel que révélé par l’enquête Télétravail, à savoir 39 % des employés. Ce scénario considère également un déplacement supplémentaire pour « autres motifs » induit par chaque jour télétravaillé supplémentaire et une aug-mentation de l’intensité de la pratique d’1,4 jour par semaine (enquête Télétravail) à deux jours par semaine pour les télétravailleurs. Son impact est mesuré par rapport au scénario de référence des Pers-pectives de la demande de transport (2019), légèrement adapté suite à l’introduction explicite du télé-travail dans le modèle.

L’analyse du scénario d’augmentation volontariste du télétravail montre qu’une intensification de la pratique a un effet modeste sur la demande totale de transport. Ce scénario entraine une diminution de seulement 1,2 % des passagers-kilomètres parcourus en Belgique en 2040 par rapport au scénario de référence. Cet effet global modeste est cependant obtenu par compensation entre deux effets plus significatifs. D’une part, une baisse plus marquée de la demande de transport au motif de la navette domicile-travail. D’autre part, une augmentation de la demande de transport pour « autres motifs ».

Du fait des liens identifiés entre la pratique du télétravail et les caractéristiques des employés (âge, sexe, niveau d’éducation) et de leur emploi (branche d’activité, distance au lieu de domicile), l’effet d’un tel scénario sur les navettes domicile-travail est inégalement réparti sur le territoire national et entre modes de transport. Ce sont les déplacements à destination du bassin d’emploi central constitué par l’agglomération bruxelloise qui enregistrent les plus grandes variations, ainsi que les déplacements en train en termes relatifs. Ces deux aspects sont liés aux distances plus grandes typiquement parcourues en train ou à destination de Bruxelles entre domicile et lieu de travail, ainsi qu’à la corrélation positive observée entre usage du train et télétravail pour les emplois dans les branches administratives et de services financiers et aux entreprises, branches largement représentées dans la capitale nationale. Ainsi, la na-vette entrante à destination de la Région de Bruxelles-Capitale depuis le reste de la Belgique diminuerait de plus de 23 % en projection. En termes absolus, c’est l’usage de la voiture solo pour se rendre sur son lieu de travail qui diminuerait le plus en volume dans un tel scénario.

L’introduction des déplacements induits pour « autres motifs » lors des jours télétravaillés entraine, naturellement, un surplus de déplacements pour ce motif par rapport au scénario de référence, principalement en voiture, en heures creuses, et proche des lieux de domicile des télétravailleurs.

Le remplacement d’une partie des navettes domicile-travail par des déplacements pour « autres motifs » n’aboutit à un bilan net peu différent du scénario de référence que si l’on considère la demande de transport globale. Considéré en plus grand détail, il provoque une redistribution spatiale, modale et temporelle de la demande. Les trajets de plus longue distance, en période de pointe, à destination des grands bassins d’emploi, évités par l’augmentation du télétravail, sont en grande partie compensés par des trajets de plus courte distance, plus largement réalisés en heures creuses, et plus diffus sur le territoire national. De cette moins grande concentration relative des déplacements résulte une moindre congestion du réseau routier entrainant une différence modeste mais positive des vitesses moyennes sur ce réseau en 2040. L’amélioration est plus sensible autour de Bruxelles, dans la zone RER, où les vitesses moyennes en fin de projection gagnent près de 8 % sur les voies soumises à la redevance kilométrique pour les poids lourds (voies à péage). Sans avoir d’impact global notable sur le choix modal pour le transport de marchandises, cette situation plus favorable sur le réseau routier aux heures de pointe amène à une légère recomposition du trafic routier de marchandises, qui se réoriente légèrement vers les heures de pointes et les voies à péage.

L’analyse de sensibilité des résultats à la variation du nombre moyen de jours télétravaillés et du nombre de trajets pour « autres motifs » induits par la pratique du télétravail indique que ces conclusions sont robustes dans leur ensemble. L’incertitude plus importante concernant l’évolution de ces deux paramètres ne remet donc pas en cause les conclusions tirées ici.

En conclusion, la présente étude apporte un éclairage nouveau sur le lien entre télétravail et demande de transport. On y a constaté les effets bénéfiques d’une pratique augmentée du télétravail sur la demande adressée aux réseaux de transport, même dans l’hypothèse de déplacements induits assez nom-breux. On a pu constater également l’impact sur les parts modales, le train étant le mode enregistrant la plus forte baisse du fait des caractéristiques de ses usagers. Cependant, on a pu montrer également que même dans le cas étudié d’une augmentation très importante de la pratique du télétravail au regard de son potentiel en Belgique, les effets restent modestes en termes absolus. Ainsi, si le télétravail représente bien une piste d’amélioration de la mobilité sur notre territoire, sa pratique accrue ne peut être considé-rée comme un remède suffisant aux problèmes engendrés par la congestion routière en heure de pointe, et doit faire partie d’un ensemble plus large de mesures jouant à la fois sur la demande totale, mais aussi sur la répartition modale et temporelle de cette demande.

 

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None

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