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Dans un souci de transparence et d’information, le BFP publie régulièrement les méthodes et résultats de ses travaux. Les publications sont organisées en séries, entre autres, les perspectives, les working papers et planning papers. Certains rapports peuvent également être consultés ici, de même que les bulletins du Short Term Update publiés jusqu’en 2015. Une recherche par thématique, type de publication, auteur et année vous est proposée.

Aide publique aux entreprises en faveur de la recherche et du développement en Belgique – Quatrième évaluation [ REP_12721 - ]

Les subventions régionales et certaines incitants fiscaux semblent encourager les entreprises à augmenter leurs investissements dans les activités de R&D. Certaines incitations de l’impôt des sociétés semblent n’avoir aucun effet d’additionnalité, voire évincer des dépenses en R&D que les entreprises autofinanceraient. Vue que ces incitants se représentent la part du lion du coût budgétaire en augmentation rapide du soutien public à la R&D des entreprises, l’efficience des incitants fiscaux pour les activités de R&D pourrait être accrue en introduisant un plafond sur le montant total de l’aide publique que les entreprises peuvent recevoir, comme le montre également une étude internationale.

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A : Auteur, C : Contributeur

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Rapports

Le rapport présente les travaux réalisés par le BFP, à la demande des autorités ou de partenaires, dans ses domaines d’expertise. 

Synthèse

La Belgique figure parmi les sept pays de l’UE à avoir atteint son objectif d'investissements dans la recherche et le développement (R&D) en 2020. Avec des dépenses en R&D égales à 3,48 % du Produit intérieur brut (PIB), la Belgique a largement dépassé l’objectif d'intensité de R&D de 3 % et a pris la deuxième place, juste derrière la Suède. La forte intensité de R&D en 2020 s'explique en partie par un recul du PIB (dénominateur de l'intensité de R&D) dû au Covid-19, mais la Belgique est néanmoins l'un des pays de l'UE dont l'intensité de R&D a le plus progressé depuis 2010.

Pour concrétiser son engagement à atteindre l’objectif des 3 %, fixé lors du Conseil européen de Barcelone en 2002, le gouvernement fédéral a instauré, à partir de 2005, plusieurs incitants fiscaux dans l’objectif de soutenir la R&D des entreprises. Cette aide indirecte, sous la forme d’incitants fiscaux, est venue compléter l’aide directe substantielle (subventions) octroyée par les trois Régions. Les incitants fiscaux à la R&D ont été accordés par le biais de l'impôt des personnes physiques, comme la dispense partielle de versement du précompte professionnel sur les salaires du personnel de R&D, ou par le biais de l'impôt des sociétés, au titre de crédit d'impôt pour les investissements en R&D et de déduction des revenus des brevets. En 2018, une dispense partielle pour le personnel R&D titulaire d’un bachelier a complété les quatre mesures de dispense déjà existantes. La déduction pour revenus de brevets, introduite en 2008, a été remplacée en 2016 (et supprimée en 2021) par une déduction pour revenus d'innovation. Celle-ci a été élaborée conformément aux lignes directrices de l'OCDE sur l'érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (BEPS), qui visent à lutter contre l'évasion fiscale des entreprises multinationales. Les incitants fiscaux en faveur de la R&D des entreprises ont progressivement gagné en popularité et, partant, leur coût budgétaire estimé a considérablement augmenté pour atteindre 2 782 millions d'euros (0,59 % du PIB) en 2019, en raison notamment d'une forte augmentation du coût des incitants liés à l'impôt des sociétés.

Ce rapport présente les résultats de la quatrième évaluation de l’aide publique à la R&D des entreprises en Belgique. L’évaluation a visé à déterminer dans quelle mesure les aides directes (subventions régionales) et indirectes (incitants fiscaux) ont contribué à la forte augmentation de l'intensité de R&D, en soutenant des activités de R&D que les entreprises n’auraient pas réalisées en l’absence d’aide publique. L'évaluation de l'efficacité et de l'efficience de l’aide publique est compliquée par les limites des données et la difficulté à fournir des indications du lien de causalité entre l’aide et les dépenses de R&D des entreprises. Dans la continuité des évaluations précédentes, la stratégie d'estimation adoptée ici consiste à réaliser une estimation de référence et à comparer ses résultats avec les résultats d’autres méthodes d’estimation afin d’établir si des conclusions robustes peuvent être dégagées.

L'évaluation fournit des indications robustes qui montrent que l’aide directe (les subventions régionales) et la dispense partielle de versement du précompte professionnel sur les salaires du personnel de R&D encouragent les entreprises à investir dans les activités de R&D, au-delà de l’aide publique qu’elles reçoivent. Ce résultat confirme les conclusions des évaluations précédentes. Ce constat vaut aussi pour la dispense partielle en faveur du personnel de R&D titulaire d'un bachelier, qui n’était pas prise en compte dans les évaluations précédentes puisqu’elle a été introduite en 2018. Comme dans les évaluations précédentes, il y a peu d'indications d'additionnalité pour le crédit d'impôt pour les investissements en R&D et la déduction pour revenus de brevets. La déduction fiscale pour les investissements en R&D qui, faute d’informations complètes, n'avait pas été complètement évaluée dans les analyses précédentes, incite les entreprises à consacrer des moyens plus importants à la R&D. Le résultat le plus inquiétant de cette quatrième évaluation concerne la déduction pour revenus d'innovation. Cette incitation fiscale liée à l’impôt des sociétés a été introduite en 2016 pour remplacer la déduction pour revenus de brevets. Les estimations présentées dans ce rapport aboutissent à des indications robustes d'effets d’éviction pour ce régime fiscal. Autrement dit, il semble que la déduction pour revenus d'innovation finance des dépenses de R&D que les entreprises financeraient de toute manière elles-mêmes en l'absence d'incitants fiscaux. Le fait que les incitants fiscaux octroyés par le biais l’impôt des sociétés, à l'exception de la déduction fiscale pour les investissements en R&D, semblent inefficaces, voire s’accompagnent d’effets d'éviction, montre qu'il existe une marge pour accroître l’efficience des incitants fiscaux à la R&D, surtout qu'ils représentent la majeure partie du coût budgétaire de l’aide publique à la R&D des entreprises en Belgique.

Ce rapport fournit également des estimations de l'impact du bonus à l'innovation. Celui-ci consiste en un bonus exonéré de cotisations sociales octroyé aux travailleurs qui soumettent des idées innovantes au sein d'une entreprise. Le financement européen de la recherche par les entreprises belges est également évalué. Les estimations suggèrent une additionnalité pour le bonus à l'innovation mais un effet d'éviction pour le financement européen.

La prise en compte de différents groupes d'entreprises et de branches, suivant plusieurs dimensions, a révélé une hétérogénéité substantielle des effets de l’aide publique. Les résultats pour différents groupes d'entreprises et de branches peuvent avoir des signes opposés, qui sont susceptibles de s'annuler dans les estimations qui considèrent toutes les entreprises actives en R&D comme une population homogène. Ainsi, il apparaît que les effets d’éviction liés à certains incitants fiscaux accordés par le biais de l’impôt des sociétés sont surtout observés dans les grandes entreprises et les entreprises plus anciennes, les entreprises appartenant à des multinationales et les entreprises de branches très concentrées. Ces résultats devraient attirer l'attention sur l'impact potentiellement négatif de l'aide publique sur la dynamique de marché étant donné qu’elle peut renforcer la concentration du marché et les effets du "winners-take-most", et sur la faible efficacité de l'aide publique dans les branches fortement concentrées. Les résultats de ce rapport mettent en lumière une hétérogénéité substantielle des effets de l’aide publique entre les branches, et encore davantage entre les entreprises (au sein des branches). Il serait dès lors possible d’accroître l’efficacité et l’efficience de l’aide publique en ciblant des branches ou groupes d’entreprises spécifiques. Une telle approche nécessite toutefois un cadre bien défini, fondé sur des données probantes, ce qui fait défaut aujourd’hui. En outre, la conditionnalité des aides publiques peut être contraire aux règles de l'UE sur les aides d'État, qui interdisent généralement de cibler les aides publiques sur des entreprises ou branches spécifiques. La question du ciblage est toutefois au cœur du débat actuel sur la politique industrielle et les programmes axés sur les missions.

Comme dans les évaluations précédentes, il y a des indications claires que lorsque les entreprises combinent plusieurs aides publiques, les instruments individuels sont beaucoup moins efficaces pour stimuler la R&D. Ce n’est pas la combinaison des instruments elle-même qui semble poser un problème, mais plutôt la combinaison d'aides importantes, sans aucun plafonnement du montant total d’aide dont bénéficient les entreprises. L'efficience de l’aide publique diminue lorsque l’aide publique totale augmente, à la fois au niveau du taux d’aide et du montant total d’aide. Les effets d’éviction des incitants fiscaux se manifestent aux montants les plus élevés de l’aide publique totale. Ces résultats montrent que plafonner les aides publiques peut contribuer à accroître l’efficience de ces aides et peut contribuer à contenir l'augmentation considérable de leur coût budgétaire, principalement causée par les incitants fiscaux qui semblent les moins efficaces. Une analyse de vingt pays de l'OCDE, dont la Belgique, révèle que les régimes d'incitation fiscale à la R&D qui plafonnent les montants des aides ou réduisent le taux d’aide une fois un certain seuil atteint, sont susceptibles de présenter une plus grande additionnalité.          

Les arguments en faveur de l’aide publique à la R&D des entreprises reposent principalement sur l'existence supposée d'un impact positif des activités de R&D des entreprises sur le reste de l'économie. Ces effets de spillover induisent un rendement privé de la R&D inférieur à son rendement social. Comme les entreprises ne sont intéressées que par le rendement privé de leurs activités de R&D, elles risquent de ne pas investir suffisamment d'un point de vue de la société dans son ensemble, d'où le rôle potentiel des subventions et des incitants fiscaux pour stimuler la R&D des entreprises. Le présent rapport examine, de manière plus détaillée que les évaluations précédentes, le rôle de l’aide publique dans les résultats potentiels des activités de R&D. Le choix de l'indicateur d’output, et des variables permettant de détecter les spillovers, n'est pas anodin et est compliqué par l'absence d'indications claires sur les indicateurs de production que les législateurs avaient à l'esprit lorsqu'ils ont introduit l’aide publique. Si l'on considère des indicateurs tels que la productivité, le chiffre d'affaires, la valeur ajoutée et les bénéfices, la R&D autofinancée semble générer un rendement privé positif. Le rendement privé de la R&D financée par des subventions régionales semble être encore plus élevé que la R&D autofinancée. Le rendement privé de la R&D financée par la dispense de versement du précompte professionnel s'avère négatif dans certains cas, ce qui pourrait indiquer que les activités de R&D financées par ces dispositifs soutiennent des activités moins utiles du point de vue économique. Les estimations suggèrent également que la R&D financée par des incitants liés à l’impôt des sociétés génère un rendement positif pour les bénéficiaires de l'aide, bien qu’il soit généralement inférieur au rendement de la R&D autofinancée et de la R&D financée par des subventions régionales. Toutefois, étant donné que seules les entreprises bénéficiaires et les entreprises dont les activités de R&D antérieures ont été concluantes, c’est-à-dire qu’elles génèrent des revenus de brevets ou d'innovations, ont accès à ces incitants fiscaux, les « effets » positifs peuvent simplement refléter le fait que de bonnes performances sont une condition nécessaire pour bénéficier de ces incitants. Les estimations montrent qu’il y’a des indications d’effets de spillover positifs de la R&D, par exemple lorsque les entreprises combinent les dispositifs d’aide, mais autres résultats suggèrent aussi des effets de spillover négatifs, qui pourraient révéler des effets de ‘business stealing’ ou d’imitation par des concurrents plus à la traîne. Les jeunes entreprises, les entreprises domestiques qui n'appartiennent pas à un groupe multinational et les entreprises ayant des activités de R&D occasionnelles, ne semblent pas bénéficier de la R&D des autres entreprises. Cela jette un doute sur le degré de diffusion de la connaissance parmi les entreprises belges qui n’appartiennent pas à un groupe multinational. Faute de données, cette évaluation ne prend pas en compte la R&D étrangère, qui est connue pour être une source importante de spillovers pour les entreprises actives dans une petite économie ouverte comme l’est la Belgique. L’absence de variables sur les spillovers étrangers pourrait biaiser les estimations du rendement privé de la R&D ainsi que les estimations des spillovers domestiques. Il serait dès lors indiqué d’inclure à l’avenir les spillovers étrangers dans les évaluations. Même si les résultats potentiels de la R&D des entreprises sont la motivation ultime de l'aide publique, les limites qui accompagnent les estimations justifient une grande prudence dans l'interprétation de l’impact de l’aide publique sur l’output présenté dans ce rapport.

Récemment, plusieurs auteurs et organisations internationales ont commencé à mettre en garde contre le risque que l’aide publique subventionne de manière excessive la recherche appliquée et sous-finance la recherche fondamentale (publique), malgré l'importance bien connue de la recherche fondamentale et la complémentarité des R&D publique et privée. La Belgique est l’un des pays de l’OCDE les plus généreux sur le plan des incitants fiscaux à la R&D des entreprises. Comme ces incitants tendent à encourager la recherche appliquée et le développement expérimental, plus que la recherche fondamentale, il convient de se demander si l’offre d’aides publiques en Belgique n'encourage pas trop la recherche appliquée et le développement expérimental, au détriment des investissements dans la recherche fondamentale (publique) et des complémentarités entre les entreprises et d’autres acteurs du système d'innovation.

  Données à consulter

None

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